
Nouakchott, 27 août 2025 – L’organisation internationale Human Rights Watch (HRW) accuse la Mauritanie de commettre depuis 2020 de graves abus contre les migrants et demandeurs d’asile. Dans un rapport publié mercredi, l’ONG détaille un système d’arrestations arbitraires, de tortures, de viols et d’expulsions collectives, impliquant directement les forces de sécurité mauritaniennes.
Pays charnière entre l’Afrique de l’Ouest et le Maghreb, la Mauritanie est devenue un point de départ central pour les migrants africains cherchant à gagner l’Europe via l’océan Atlantique et les îles Canaries. Face à cette intensification, Nouakchott a signé plusieurs accords avec l’Union européenne et l’Espagne, destinés à renforcer le contrôle migratoire.
Mais selon HRW, ces partenariats conduisent à une externalisation brutale de la politique migratoire européenne, au prix de violations systématiques des droits fondamentaux.
Le rapport, basé sur des centaines de témoignages de migrants, dénonce les pratiques des forces de sécurité police, gendarmerie, armée et garde-côtes. Les migrants décrivent :
- des tortures physiques et psychologiques,
- des viols et violences sexuelles,
- des arrestations sans motif,
- des extorsions d’argent lors des contrôles,
- et des conditions inhumaines dans les centres de rétention : manque de nourriture, insalubrité et brutalités des gardiens.
Un migrant interrogé par l’ONG raconte avoir été refoulé en plein désert, sans eau ni assistance, le long de la frontière avec le Mali.
HRW affirme que les autorités mauritaniennes procèdent régulièrement à des refoulements collectifs, notamment vers des zones reculées à la frontière avec le Sénégal et le Mali. Ces pratiques exposent les exilés à l’insécurité et à un abandon quasi total.
En début d’année, une vague d’expulsions massives avait déjà suscité l’indignation des pays voisins. Selon plusieurs sources médiatiques, près de 28 000 migrants auraient été expulsés depuis janvier 2025 un chiffre que Nouakchott n’a pas confirmé.
Malgré ces risques, la route atlantique reste l’une des plus empruntées et la plus mortelle. En 2024, l’ONG espagnole Caminando Fronteras a recensé 10 457 migrants morts ou disparus en mer en tentant de rejoindre les îles Canaries.
Paradoxalement, cette même année, un record historique de 46 843 arrivées a été enregistré dans l’archipel espagnol.
HRW met en cause la responsabilité de l’UE et de l’Espagne dans ces abus, accusant Bruxelles et Madrid d’ignorer les violations documentées au profit d’un renforcement du contrôle des frontières. L’ONG appelle à une révision urgente des accords migratoires et exige que la protection des droits humains devienne une priorité incontournable dans toute coopération avec la Mauritanie.
Pierra S.