
Washington, 1er octobre 2025 – L’African Growth and Opportunity Act (AGOA), pierre angulaire des relations commerciales entre les États-Unis et l’Afrique subsaharienne depuis 2000, a officiellement expiré le 30 septembre 2025. Cette échéance ouvre une période d’incertitude majeure pour plusieurs économies africaines, alors que la Maison-Blanche se dit favorable à une courte prolongation d’un an.
Selon l’agence Reuters, citant un responsable de la Maison-Blanche, l’administration Trump appuie un renouvellement technique de l’AGOA, limité à une année. L’objectif serait de gagner du temps pour mener une révision plus complète du dispositif. Cette prolongation pourrait être incluse dans une loi de finances temporaire ou, en cas de retard, appliquée rétroactivement si le Congrès parvient à un accord politique.
Ce soutien s’aligne sur les déclarations faites quelques jours plus tôt par le ministre du Commerce du Lesotho, Mebbethi Shelile. De retour d’une mission diplomatique à Washington, il avait affirmé avoir reçu des assurances informelles de la part de parlementaires américains, notamment au sein de la House Ways and Means Committee et de la Senate Finance Committee, qu’un report d’un an serait acté d’ici la fin de l’année.
L’absence de régime préférentiel entraîne mécaniquement une hausse des coûts pour les entreprises africaines exportant vers les États-Unis. Plusieurs secteurs clés notamment le textile, l’agro-industrie et certaines industries légères sont particulièrement vulnérables à cette suspension.
Le Président sud-africain, Cyril Ramaphosa, a profité de son passage à New York, en marge de la 80ᵉ Assemblée générale des Nations unies, pour rappeler que la prorogation de l’AGOA demeure un levier crucial de création d’emplois et d’accès aux marchés internationaux pour de nombreuses PME africaines.
Si la Maison-Blanche affiche son soutien à une extension d’un an, les acteurs économiques africains s’interrogent : cette décision ne repousserait-elle pas simplement l’échéance à 2026, avec les mêmes incertitudes ? Ce flou traduit-il une réelle volonté de réforme en profondeur ou seulement une mesure transitoire face à la pression des exportateurs africains ?
Les observateurs rappellent qu’un projet de réforme plus ambitieux avait été déposé en 2024. Celui-ci visait à prolonger l’AGOA jusqu’en 2041, à l’arrimer à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf) et à offrir davantage de visibilité aux investisseurs grâce à des mécanismes de suivi et d’évaluation plus souples.
Selon l’ONG ODI Global, la fin de l’AGOA et la hausse parallèle des droits de douane pourraient coûter jusqu’à 89 milliards de dollars par an aux pays à revenu faible et intermédiaire. Six économies africaines figurent parmi les plus exposées.
De son côté, la Fondation pour les études et recherches sur le développement international (Ferdi) estime que, même si l’impact direct des nouveaux tarifs américains pourrait rester limité dans l’immédiat, les pays africains risquent de subir de plein fouet la volatilité accrue des prix des matières premières dans un contexte de tensions commerciales croissantes entre Washington et Pékin.
Pour l’heure, la balle est dans le camp du Congrès américain, seule habilité à donner un cadre légal et sécurisant pour les investisseurs. Sans une décision rapide, les économies africaines risquent de naviguer dans l’incertitude, freinant à la fois les exportations et les investissements directs.
L’Afrique observe donc avec attention les prochaines négociations à Washington, consciente que l’avenir de ses échanges commerciaux avec les États-Unis se joue dans les prochaines semaines.
Stella S.