
Lors d’une foire du commerce intra-africain organisée en Algérie, l’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo a invité les pays africains à réduire leur dépendance vis-à-vis des institutions de Bretton Woods. Selon lui, ni la Banque mondiale ni le Fonds monétaire international (FMI) ne servent réellement les intérêts du continent.
« La Banque mondiale n’est pas faite pour nous, le FMI non plus », a-t-il déclaré, exhortant les États africains à concentrer leurs efforts sur le commerce intra-africain et sur leurs propres mécanismes de financement.
Cette sortie d’Obasanjo reflète un malaise croissant face au rôle de ces institutions internationales en Afrique.
Djimadoum Mandekor, économiste et ancien directeur à la Banque des États d’Afrique centrale, estime que cette critique est largement partagée : « On reproche souvent à la Banque mondiale et au FMI d’être davantage au service des pays occidentaux qui les ont créés, d’imposer des règles strictes sans fournir les ressources nécessaires aux économies africaines », explique-t-il.
La Banque mondiale finance des investissements et soutient certaines politiques publiques, tandis que le FMI intervient surtout pour restaurer les équilibres macroéconomiques et combler les déficits de balance des paiements. Mais leurs programmes d’ajustement structurel et leurs évaluations économiques suscitent souvent la méfiance des populations africaines, qui estiment qu’elles ne reflètent pas toujours la réalité vécue.
Au-delà des critiques, un autre débat persiste : celui de la gestion interne. Plusieurs voix rappellent que les financements extérieurs ne devraient être qu’un appui et non un substitut.
« Depuis les indépendances, l’Afrique disposait de peu de ressources. Les aides de la Banque mondiale et d’autres bailleurs ont été perçues comme nécessaires. Mais aujourd’hui, il faut absolument utiliser efficacement nos ressources, internes comme externes, pour investir dans la santé, l’éducation et les infrastructures », souligne Mandekor.
Pour l’économiste, la solution passe par une intégration économique plus poussée au sein du continent.
Dès les années 2000, l’Union africaine avait envisagé la création d’un Fonds monétaire africain et d’une Banque africaine d’investissement, distincte de la Banque africaine de développement. Mais ces projets peinent à se concrétiser.
« Ce n’est pas seulement d’avoir des institutions, il faut les faire fonctionner », insiste Mandekor, plaidant pour plus de rigueur et de mobilisation des ressources nationales afin de bâtir une véritable autonomie financière africaine.
Pierra S.